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Disparition d'Anise Postel-Vinay née Girard (1922-2020)

Actualité Actualité, Mar 2 juin 2020

Née en 1922, issue d'une famille républicaine originaire de l'est de la France, Anise Girard perçoit rapidement dans sa jeunesse le danger que représente la montée du nazisme en Allemagne.

Menant des études d'allemand à la Sorbonne, elle est consternée par le choix de l'armistice et de la collaboration avec le vainqueur fait par Pétain en 1940 et ne supporte pas de vivre dans un Paris occupé. Déterminée à s'engager au sein de la Résistance pour que la France retrouve sa liberté, elle pense d'abord rejoindre Londres avant finalement de trouver le moyen d'agir en intégrant début 1941 alors qu'elle n'a que 19 ans le réseau de renseignements britannique de l'Intelligence Service SMH Gallia où elle croise Samuel Beckett. Elle multiplie les missions pour collecter des renseignements militaires qui sont transmis ensuite à Londres. Elle est notamment chargée de relever les positions Bunkers allemands autour de la Capitale. Un an plus tard, elle est arrêtée, le 15 août 1942. Emmenée au siège de la Gestapo rue des Saussaies à Paris, Anise Girard est écrouée à la prison de la Santé, avant d'être transférée à la prison de Fresnes. Durant sa détention, elle parvient à correspondre clandestinement avec sa mère au moyen de petits bouts de papiers de fortune dissimulés dans les ourlets de ses vêtements lors des échanges de linge. « Quand j'écrivais à ma mère, je croyais toujours que la lettre que j'écrivais serait la dernière. Même si je n'imaginais pas la sauvagerie des camps, je me disais bien que nous avions très peu de chances de rentrer vivants. J'écrivais donc de très belles lettres, pleines de bons sentiments. Et je parlais aussi de politique, parce que c'était très important pour moi(1) »

Anise Postel-Vinay est déportée NN (Nacht und Nebel) en octobre 1943. Dans le convoi de déportation qui l'emmène au camp de Ravensbrück, elle rencontre l'ethnologue Germaine Tillion, de quinze ans son aînée. Les deux femmes restent proches et se soutiennent mutuellement tout le temps de leur déportation.

Dans l'univers mortifère de ce camp de femmes, la solidarité est le seul moyen de survivre. Lorsqu'elle rencontre Geneviève de Gaulle, la nièce du chef de la France libre, la santé de cette dernière décline. Anise trouve un stratagème pour la sauver en la changeant de Block et en la cachant dans un autre atelier. Elle-même atteinte de tuberculose, Anise Girard est aidée par un groupe de camarades polonaises grâce auxquelles elle est envoyée travailler dans un atelier moins exposé.

Anise est libérée le 23 avril 1945 par la Croix-Rouge suédoise en même temps que Germaine Tillion. De retour en France, elle apprend la mort de sa sœur, Claire Girard, mais retrouve son frère rescapé du camp de concentration de Buchenwald et son père revenu de celui de Dora.

Le 6 juin 1946, elle épouse André Postel-Vinay, haut-fonctionnaire qui a été l'un des pionniers de la résistance en région parisienne avant de rejoindre les Français libres à Londres à la suite de son évasion de la prison de la Santé où il était interné en 1942. André Postel-Vinay a été fait compagnon de la Libération par le général de Gaulle. Dès lors, elle s'engage avec Germaine Tillion dans l'écriture de l'histoire du camp de Ravensbrück et son rôle dans le système concentrationnaire nazi. Très investie dans les associations issues de la Résistance et de la Déportation, elle devient secrétaire générale de l'Association des Déportées et Internées de la Résistance (ADIR). Au sein de l'ADIR, elle œuvre pendant près de 10 ans pour la reconnaissance par l'ONU et la RFA des sévices subis lors d'expérimentations pseudo scientifiques à Ravensbrück, combat qui aboutit en 1957, avec l'indemnisation des victimes polonaises survivantes. Elle est également cofondatrice de l'association Germaine Tillion, et sa première secrétaire générale. Jusqu'à la fin de sa vie elle ne cessera de témoigner sur son expérience concentrationnaire.

 

(1) Anise Postel-Vinay avec la collaboration de Laure Adler, Vivre, Paris, éditions Grasset, 2015, p.38.