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Une jeunesse confisquée 1940-1945


Jean Gavard
Edition L'Harmattan, 2007, 146 pages

Avant-propos de Daniel Simon, président de l'Amicale de Mauthausen.

Préface de Laurent Douzou, professeur d'Histoire contemporaine à l'IEP de Lyon.

L'Harmattan, 146 p., 13.50 €.

 

Dans ce livre Jean Gavard retrace avec beaucoup de modestie et de pudeur son engagement dans la Résistance et sa déportation à Mauthausen.

Lycéen bordelais, Jean Gavard n'a que 17 ans lorsqu'au cours du premier trimestre 1941 il est recruté par le réseau Confrérie Notre Dame du colonel Rémy. Ses parents habitant un petit village de Gironde situé entre la Réole et Sauveterre-de-Guyenne, à quelques kilomètres de la ligne de démarcation, il va en plus de ses missions de renseignements sur les terrains d'aviation allemands être amené à faire passer en " zone libre " des agents mais surtout de nombreux documents de son réseau, des messages codés qu'il mêle à ses notes de cours ou qu'il dissimule dans ses livres scolaires.

Mais bientôt arrive le temps de la répression. Le 10 juin 1942, à l'approche des épreuves du baccalauréat, suite à une trahison, Jean Gavard est arrêté en même temps que Jean Cayrol et vingt membres de son réseau. Interrogé il est emprisonné à Bordeaux puis transféré à Fresnes où il connaît les affres de la torture morale de la mise au secret. Après dix mois d'isolement, le 25 mars 1943 il est convoyé à la gare de l'Est pour être déporté à Mauthausen. Refusant un récit linéaire induisant une reconstruction, Jean Gavard par tableaux successifs évoque cette " expérience unique " qu'il décrit lui-même comme " une rupture, quelque chose d'"extra ordinaire", d'extérieur à mon être, qui tranche avec le reste de ma vie ". Il ne raconte donc pas l'ordinaire de Mauthausen ou de Gusen mais rapporte essentiellement les moments où la conscience humaine résiste à l'aliénation voulue par le système concentrationnaire nazi comme : ce geste d'entraide d'un soldat mongol, prisonnier de l'Armée soviétique qui au péril de sa vie lui donne une gamelle de " café ", l'aide qu'il apporte à un témoin de Jéhovah qui refuse de produire des armes à l'usine Steyr, ou bien ses rencontres avec le père Jacques celui dont la vie va  inspirer à Louis Malle le film Au revoir les enfants...

Dans une deuxième partie de ce livre Jean Gavard montre comment, dès son retour de déportation, il participe à la transmission de cette Mémoire notamment dans le milieu scolaire. Peu à peu, à côté d'une carrière dans l'administration de l'Éducation nationale, il s'investit dans les associations de résistants et de déportés et notamment à l'amicale de Mauthausen où il participe entre autres à l'organisation des voyages d'études dédiés aux enseignants. Désireux de transmettre son témoignage " aux femmes et aux hommes qui [lui] survivront, dans un monde différent, mais où chaque être se situera toujours entre liberté et aliénation ", à partir des années soixante, il intervient régulièrement devant des élèves dans le cadre du Concours national de la Résistance et de la Déportation. Concours qu'il contribue à faire rayonner lorsqu'il assume la présidence de son jury national de 1993 à 2001 succédant à Louis François lui aussi membre de CND.

Ce récit touche non seulement par sa sobriété et sa pudeur, mais aussi par ce qu'il révèle de l'humanisme profond de son auteur.

Frantz Malassis