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Michael TROTOBAS


(réseau Sylvestre-Farmer)
1914-1943
M.Trotobas, sous-lieutenant dans les British Expeditionary Forces, avant son départ en France occupée.
(Photographie extraite de ©Danièle Lheureux, La Résistance
M.Trotobas, sous-lieutenant dans les British Expeditionary Forces, avant son départ en France occupée.
(Photographie extraite de ©Danièle Lheureux, La Résistance "Action-Buckmaster". Sylvestre-Farmer avec le cpt Michel, Le Geai bleu, éditeurs, 2002)


Connu dans la clandestinité sous le pseudonyme de "Capitaine Michel", Michael Trotobas est né à Brighton en 1914 d'un père français et d'une mère irlandaise.

Il ne verra son père pour la première fois qu'à la fin de la Grande guerre, celui-ci ayant été mobilisé en France puis fait prisonnier en Allemagne. Michael passe une partie de son enfance à Dublin, où il fréquente une école catholique, puis il rejoint la France en 1926. Sa famille s'installe pour quelque temps à la Seyne-sur-Mer et il poursuit sa scolarité à Toulon, scolarité entrecoupée de séjours à Londres.

De retour en Angleterre en 1930, Michael Trotobas choisit de faire une carrière militaire dans l'armée britannique. En mai 1940, engagé dans le corps expéditionnaire anglais, sous les ordres de Montgomery, face à l'invasion de la Belgique et du Nord de la France par les troupes allemandes, il se trouve replié sur Dunkerque. Il est évacué avec les 200000 soldats anglais et quelque 130000 soldats français, embarqués pour l'Angleterre sous les bombardements allemands.

Nommé en janvier 1941 sous-lieutenant au British Expeditionary Forces (BEF), impatient d'agir en France, Michael Trotobas se porte volontaire pour devenir agent du SOE* (Special Operations Executive), organisme anglais créé à l'été 1940 pour constituer des réseaux clandestins de sabotage dans les pays européens occupés par l'Allemagne, et organisé en plusieurs sections. Apprécié pour sa parfaite maîtrise de la langue française Trotobas, après un stage de préparation, est nommé capitaine puis envoyé pour une première mission en France. Dans la nuit du 6 au 7 septembre 1941, il est parachuté au sud de Châteauroux en compagnie de six autres agents de la section F du SOE. Cette première mission est un échec : Michael Trotobas est arrêté le 27 octobre 1941 ; emprisonné à Limoges puis à la prison de Périgueux, il est transféré en mars 1942 au camp d'internement de Mauzac, en Dordogne. D'autres agents français et anglais du SOE sont internés dans ce camp. Une évasion, organisée dans la nuit du 15 au 16 juillet 1942, parvient à le libérer ; après un passage par l'Espagne et Gibraltar, Trotobas rejoint Londres en novembre 1942. Proposant à nouveau ses services aux dirigeants du SOE*, ces derniers lui confient l'organisation d'un réseau dans la région du Nord et du Pas-de-Calais.

Une nouvelle fois il est parachuté, fin novembre 1942, cette fois-ci près de Beaune-la-Rolande, dans le Loiret, en compagnie de deux autres agents du SOE, Guy Bieler et Arthur Staggs, un radio. Avant de rejoindre Lille, où il espère retrouver une amie qui l'hébergerait, Michael Trotobas séjourne quelque temps à Paris, dans la famille Séailles, dont deux membres participeront au réseau qu'il va créer.

Mais à Lille Trotobas ne retrouve pas l'amie sur laquelle il comptait ; ne connaissant personne d'autres, sans point de chute, il se confie dans un bar à un représentant en livres, Emmanuel Lemercier, qui lui propose de l'héberger et de l'aider. C'est le premier agent du réseau " Sylvestre-Farmer ", dont l'activité se déploie rapidement dans tout le Nord-Pas-de-Calais, région où, depuis le début de l'Occupation, de nombreuses personnes sont engagées dans des activités clandestines (aide aux prisonniers de guerre évadés, puis aux aviateurs abattus, presse clandestine). De fait, la mémoire de l'occupation allemande de 1914-1918 et les sentiments anglophiles y sont très forts. Pour assurer la sécurité et la survie de son réseau, Trotobas exige de ses agents qu'ils prononcent un serment :

" Je Jure de ne jamais révéler à quiconque les noms des membres de notre organisation et d'ensevelir en moi-même tous les renseignements qui pourraient parvenir à ma connaissance.
JE JURE d'obéir fidèlement et en toutes circonstances aux chefs que j'ai librement acceptés.
JE JURE de me tenir jour et nuit à la disposition des armées alliées.
LE TOUT IMMEDIATEMENT APRES AVOIR PRETE SERMENT ET SOUS PEINE DE MORT POUR TRAHISON. AINSI M'AIDE DIEU.
NOUS NOUS ENGAGEONS à aider la femme et les enfants d'un membre de l'organisation dans le cas de l'arrestation ou de la fuite de celui-ci pour raison valable. "

En août 1943, le réseau " Sylvestre-Farmer " a recruté plus de 800 membres, répartis de la frontière belge à la Somme et à l'Aisne. Il a pour mission, plus spécifiquement, des opérations de sabotages et de déraillements de trains, en particulier sur les lignes ferroviaires Lens-Béthune (février 1943) et Amiens-Arras (été et automne 1943). Au service de cette activité principale, le réseau consacre aussi une part importante de ses efforts aux liaisons avec Londres (émissions clandestines, radio, parachutage d'armement et d'explosif, évacuation d'agents " brûlés ").

En liaison avec les objectifs militaires élaborés par l'Angleterre - détruire des usines en privilégiant les sabotages plutôt que les bombardements aériens qui entraînent parfois des victimes civiles - Trotobas organise personnellement le sabotage de l'usine de Fives, située dans la banlieue de Lille. Il se fait embaucher dans l'usine afin de repérer les objectifs précis à détruire, de relever les points faibles et les gardes. Dans la nuit du 27 au 28 juin, un groupe d'agents du réseau " Sylvestre-Farmer ", mené par Trotobas, et déguisés en gendarmes, se rend à l'usine de Fives, prétextant inspecter le système de sécurité. Ils réussissent à détruire des transformateurs, immobilisant pour quelque temps l'activité de l'usine.

Cependant, déjà inquiété en juin 1943, où il avait échappé à une arrestation par le SD*, Michael Trotobas est obligé de changer d'adresse et de se cacher. Les arrestations au sein du réseau se multiplient au cours de l'été 1943, le plus souvent à la suite de dénonciations ou de trahisons. Lui-même, dénoncé par un ancien agent de " Sylvestre-farmer ", " Olivier ", est arrêté à son domicile le 28 novembre au matin ; il cherche à se défendre mais il est tué, ainsi que sa compagne, Denise Gilman. Le réseau qu'il a créé, malgré d'importantes pertes, poursuit ses activités, désormais dirigé par Pierre Séailles.

Bibliographie

• FOOT (M.R.D.), SOE in France. An Account of the Work of the British Special Operations Executive in France. 1940-1944, London, Her Majesty Stationery Office, 1966, 550 pages.
• DEJONGHE (Etienne) et LE MANER (Yves), Le Nord-Pas-de-Calais dans la main allemande, Lille, La Voix du Nord, 1999, 400 pages.
• DEJONGHE (Etienne) [dir.], L'Occupation en France et en Belgique, 1940-1944, actes du colloque de Lille, 26-28 avril 1985, Villeneuve d'Asq, Revue du Nord, 1987-1988, 1015 pages.
• COOKRIDGE (E. H.), Mettez l'Europe à feu : organisation et action du SOE en Europe occidentale : 1940-1945, Paris, Fayard, 1968, 558 pages.
• LHEUREUX (Danièle), La Résistance "Action-Buckmaster". Sylvestre-Farmer avec le capitaine " Michel ", Roubaix, Le Geai bleu éditions, 2001, 175 pages.
• LHEUREUX (Danièle), Les Oubliés de la Résistance : Sylvestre Farmer, Paris, France-Empire, 1988, 439 pages.


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